Chapitre 7

Le lendemain matin, Nat se lève reposé et prêt à conquérir le monde.

Il s’habille, prend un petit déjeuner de lion, règle sa note, et part de l’auberge le cœur joyeux.

Son programme est simple : faire les boutiques, aller voir le port, trouver un bon restaurant pour ce midi, et visiter le grand bâtiment central de la ville. Léo lui a appris la veille que c’était une sorte d’école gigantesque mais qu’il abritait également le palais du roi. Tout le monde l’appelle l’université. Nat n’a pas tout compris, mais il ira voir par lui-même.

Il se rend donc d’abord dans la rue qu’il avait vu la veille et prend son temps pour admirer les devantures. Une boutique en particulier attire son regard. Cette boutique, plutôt petite, est une boutique de télescopes. Nat a toujours adoré les étoiles et a toujours voulu en avoir un. Il n’a d’ailleurs jamais eu l’occasion d’en voir de près. Il rentre donc dans la boutique et s’émerveille de voir ces appareils qu’il trouve vraiment magnifiques.

La boutique est un peu plus grande à l’intérieur qu’il s’y attendait. Nat se rend compte qu’il n’y a pas que des télescopes en vente, mais toute sorte d’appareils d’optiques. Certains sont étranges et Nat ne sait pas à quoi ils peuvent tous servir. Il n’en reste pas moins admiratif.

La boutique est tenue par un vieux monsieur qui lit derrière son comptoir. Il n’y a qu’un autre client dans la boutique, une personne assez petite portant un long manteau et une capuche. Nat n’y prête pas beaucoup attention. Mais en déambulant en rêvant dans la boutique, sans regarder où il mettait les pieds, Nat finit par bousculer la petite personne, qui ne regardait pas non plus où elle allait.

  • Oups pardon, disent-ils tous les deux en même temps.

Nat se rend compte que cette petite personne est en fait une petite fille qui doit avoir à peu près son âge. Elle enlève sa capuche par politesse et s’adresse à Nat :

  • Toi aussi tu aimes les télescopes ?
  • Oui je les adore dis Nat. Je n’en avais jamais vu d’aussi près avant. J’aimerais beaucoup en avoir un.
  • Moi aussi, c’est la même chose. Je n’avais jamais pu venir dans cette boutique avant.

La petite fille semble se rappeler de quelque chose et dis à Nat :

  • Je dois m’en aller, au revoir.

Et, elle file pour sortir de la boutique. Nat n’a même pas eu le temps de lui dire au revoir.

  • Bizarre cette fille… comme toutes les filles, se dit-il. Et oui à neuf ans, les filles sont un mystère.

Nat continue sa visite de la ville. Il trouve un marchand dans la rue qui vend des petits pains fourrés et en achète pour son repas du midi, qu’il prend assis sur un banc dans le port. Il fait beau, et Nat profite du soleil.

Il se dirige ensuite vers la fameuse université. Après avoir passé son enceinte, il découvre que c’est en fait un complexe de plusieurs bâtiments gigantesques. Il voit passer un groupe d’étudiants qui ont l’air d’être en retard pour leur prochain cours. Il voit également passer un groupe de personnes qui marchent d’un pas décidé avec un air sérieux. Des gens importants sûrement.

En se promenant dans l’immense cours de l’université, Nat identifie plusieurs constructions : une église, un tribunal, la bourse, l’école en elle-même, mais le plus impressionnant reste le palais royal. Malheureusement inaccessible, et bien gardé. Il voit également une bibliothèque et décide de la visiter.

Il est d’ailleurs très étonné, car il ne s’attendait pas à voir une bibliothèque aussi gigantesque. Des milliers de livres rangés sur plusieurs étages donnant tous sur un gigantesque puits central circulaire.

Il a toujours adoré les livres et a passé plus d’un mercredi après-midi à la bibliothèque municipale. Il se dit qu’il pourrait passer des journées entières dans celle-ci.

Ils doivent vraiment avoir des livres sur tout, se dit-il, et se met à la recherche de livres sur les dragons. Peut-être pourrait-il en apprendre davantage sur eux. Ou au moins ce que les humains d’ici en ont appris.

Il parcourt donc les rayonnages à la recherche des livres sur les dragons. Le temps passe vite dans ce gigantesque endroit où Nat se sent très à l’aise.

C’est à ce moment qu’il entend du bruit assez inhabituel pour le lieu. Jusqu’à maintenant, il aurait pu se croire seul dans ce lieu immense tellement c’était calme.

Il se dirige vers le bruit et au détour d’une allée de rayonnage, voit un groupe de plusieurs personnes partir en direction de la sortie. Nat n’a pas bien vu, mais trouve leur comportement très étrange.

Il décide de les suivre à distance, et finit par entendre un bruit étouffé, comme si une personne essayait de crier. Nat comprend tout de suite que quelqu’un est en train de se faire enlever sous ses yeux !

Il n’hésite pas une seconde et cours vers le petit groupe qui était arrivé dans le hall d’entrée de la bibliothèque. Le hall est désert, et Nat crie « Attendez ! ». Il se retrouve alors face à quatre hommes peu sympathiques. L’un deux tient une cinquième personne bâillonnée et cagoulée.

  • Qu’est-ce que tu veux ? demande agressivement un des hommes.
  • Libérez cette personne ! dis Nat.

L’homme répond :

  • Tu n’as rien à faire dans cette histoire. Nous sommes de la police et venons arrêter un criminel, dis l’homme avec un grand sourire.

Nat comprend tout de suite que c’est un mensonge.

  • Vous n’avez pas l’uniforme de la police ! Et si c’était vraiment un criminel, vous ne l’auriez pas emporté comme ça.

L’homme s’approche de Nat et sans prévenir, le pousse et le fait tomber par terre.

  • Laisse nous tranquille morveux !

Nat se met alors en colère. Il sait qu’il n’a aucune chance contre ces quatre hommes, mais ne se laisse pas démonter. Il a déjà été embêté par des plus grands que lui à l’école, et n’a pas du tout envie de se laisser faire. Il se relève et crie :

  • Je ne vous laisserai pas faire !

L’homme qui a poussé Nat sort alors une épée de son fourreau. Nat n’avait pas vu qu’il était armé. Il prend à son tour son poignard pour se défendre.

Vous pouvez bien imaginer qu’à neuf ans, on ne sait pas se battre et encore moins à l’épée ou avec un poignard. Mais figurez-vous qu’en un éclair, Nat réussi à parer l’attaque de l’homme et l’envoi au tapis d’un grand coup de pied. Il sent l’énergie du poignard offert par Pyro l’envahir.

A ce moment, l’homme qui tenait la personne enlevée la jette sur le sol, et les trois hommes sortent leur épée à tour de rôle.

Cette fois à trois contre un, Nat a peu de chances de s’en sortir.

Mais heureusement, c’est à ce moment qu’un groupe de dix gardes arrive pour mettre fin au combat. Nat n’en revient pas, il a été sauvé de justesse.

Les kidnappeurs sont rapidement appréhendés et emmenés par les gardes. Nat suit la scène des yeux et se tourne vers la personne qui avait été enlevée. Le chef des gardes lui a enlevé la cagoule, le bâillon et les cordes qui la tenait prisonnière.

A sa grande surprise, Nat reconnaît tout de suite la jeune fille qu’il a rencontré plus tôt dans la boutique de télescopes. Elle le reconnaît également à son tour. Elle s’adresse alors au chef des gardes :

  • Capitaine, pouvez-vous me laisser m’entretenir avec mon sauveur, j’aimerais le remercier.
  • Bien sûr princesse, répond-il.

Nat n’en croit pas ses oreilles. Le chef des gardes l’a appelée princesse !

La jeune fille emmène Nat un peu à l’écart et lui dit :

  • Merci beaucoup de m’avoir sauvée. Tu es un vrai héro. Je ne sais pas comment tu as fait, mais vraiment merci beaucoup.

Et sans que Nat ait eu le temps d’en placer une :

  • S’il te plaît, ne dit à personne que tu m’as vue cet après midi hors de l’université, je risquerais d’avoir de gros problèmes.

Nat hoche la tête. Et sans avoir le temps d’en placer une à nouveau, la princesse se tourne vers le chef des gardes et dit :

  • Pouvez-vous nous conduire au château ? J’aimerais que mon sauveur soit récompensé.
  • Bien sûr princesse.

Et sans trop comprendre ce qui lui arrive, Nat est accompagné par les gardes vers le château où il est reçu en invité. On lui offre à boire et à manger et on lui demande d’attendre patiemment dans un petit salon richement décoré.

Quelques minutes plus tard, la princesse entre à son tour. Ils sont enfin seuls et peuvent parler.

  • Merci de n’avoir rien dit, dit-elle en entrant. Je ne saurais te remercier assez.

Nat qui peut enfin dire quelque chose répond :

  • Pas de quoi … princesse … Madame …

Il se rend compte qu’il ne sait pas comment parler à une princesse. Même si elle a son âge. Doit-il dire sa majesté ? Ou quelque chose comme ça ?

La jeune fille éclate de rire.

  • Appelle moi Elianor. Ne fais pas de chichis. Et toi tu t’appelles comment ?
  • Nat, répond Nat
  • Nat ?
  • En vrai, Jean Édouard Nathanaël. Mais tout le monde m’appelle Nat.
  • Nathanaël, c’est bien mieux ! Je vais t’appeler Nathanaël, si ça te convient. D’où viens-tu ? tu as quel âge ? Que fais-tu tout seul à Heavenreach ?
  • Ça fait beaucoup de questions ! Disons que je suis un touriste, je visite la ville.
  • Un touriste ? A ton âge ?
  • Oui … oui, dit-il sans conviction. J’adore cette ville, j’ai décidé de venir la visiter …

Nat n’a pas prévu de raconter un mensonge à une princesse et se retrouve sans idée. Il voit bien qu’elle ne croit pas un mot de ce qu’il dit. Il décide donc de dire la vérité.

  • En fait, je viens d’un autre monde et j’essaye de trouver des dragons pour m’aider à rentrer chez moi.

Elianor éclate de nouveau de rire, encore plus que la première fois. Elle met un petit moment à s’en remettre et Nat se sent un peu vexé.

  • Tu es décidément très mauvais pour mentir. Mais si tu ne veux pas me dire pourquoi tu es là, je n’insisterai pas.
  • Tu es donc la princesse ? Enchaîne Nat pour changer de sujet.
  • Oui. Elianor Emmanuelle Victoire Fortunée Sangreal, duchesse de Wanngard et d’Urdangarin, princesse du royaume de Heaven.
  • Wow. Impressionnant !
  • N’est-ce pas ? Mais être princesse, ce n’est pas si amusant que ça en a l’air tu sais ? La preuve d’ailleurs aujourd’hui, sans toi je serai sûrement je-ne-sais-où, aux mains de nos ennemis jurés. Les Ténébrans.
  • Ah ce sont eux qui ont essayé de te kidnapper ? Mais qui sont-ils ?
  • Tu ne peux pas ne pas les connaître enfin, dit-elle suspicieuse. Ne te fiche pas de moi, je te rappelle que je suis une princesse ! Mais devant l’air étonné et perdu de Nat, elle continue :  c’est le peuple qui est en guerre avec nous depuis des années, ils essayent de conquérir notre territoire par tous les moyens. Nous les avons arrêtés à la frontière nord pour le moment.
  • Mais c’est terrible, dis Nat. Tu sais pourquoi ils veulent vous conquérir ?
  • Leur roi Vilradix, est fou. Lui et son conseiller Rexith veulent toujours plus de pouvoir. Je n’arrive pas à croire que tu ne les connais pas, ils sont pourtant mondialement connus aujourd’hui.

Nat ne veut pas trop insister sur son origine, il a bien compris que la princesse ne le croira pas. Ou en tout cas pas sans preuves. Il change donc de sujet.

  • Je suis content d’avoir pu t’aider en tout cas, dis Nat.
  • Je n’ai pas vu ce qu’il s’est passé mais j’ai cru comprendre que tu as battu un adulte armé ! Tu dois savoir te battre Nathanaël !

Elianor est très impressionnée et Nat rougis du compliment.

  • Non, vraiment c’était un coup de chance. N’empêche c’est une sacrée coïncidence qu’on se soit croisés deux fois aujourd’hui ! Je ne suis arrivé qu’hier. Nat essaye encore une fois de changer de sujet.
  • Oui, d’ailleurs à ce sujet. Pourrais-tu éviter de parler de notre rencontre dans la boutique de télescopes ? Vois-tu, je n’étais pas censée y aller. Je n’ai d’ailleurs pas le droit de sortir de l’enceinte du château normalement, mais j’ai réussi à tromper la vigilance des gardes.
  • Bien sûr pas de problème. Tu t’intéresses à l’astronomie ?
  • Oui ça me passionne ! Et toi ?
  • Oui moi aussi. J’ai toujours aimé regarder le ciel la nuit, et j’adorerais avoir un télescope.

Elianor et Nat discutent ainsi pendant des heures. Ils s’entendent très bien et semblent avoir plein de passions communes. Nat a bien failli lui parler de jeux vidéo, et a même failli parler de voiture et d’avion lors de la discussion mais il a réussi à se rattraper à chaque fois. Mais un peu plus tard, Elianor lui pose de nouveau la question.

  • Mais d’où viens-tu Nathanaël ? Dis-moi la vérité. Je n’ai jamais rencontré de garçon comme toi. Tu sembles savoir beaucoup plus de choses que n’importe qui d’autre.

Nat prend alors une décision. La seule preuve qu’il peut lui montrer, c’est Myst. Peut-être en le voyant, elle croira toute son histoire. De toutes façons, l’heure de retrouver son ami est proche. Il demande alors à Elianor :

  • Peux-tu m’emmener sur un toit du château ? Ou une tour ? Un endroit assez haut, j’aimerais te montrer quelque chose.
  • On peut aller sur le toit du donjon. Il a été aménagé en observatoire. Pas pour les étoiles malheureusement. En tout cas c’est un espace dégagé et le plus haut possible. Ça te va ?
  • C’est parfait, répond Nat.

Nat suit donc sa nouvelle amie jusqu’au toit du château. Nat espère que Myst le verra de là. Il sait qu’il a une vue perçante, il compte donc dessus.

  • Que veux-tu me montrer Nathanaël ?
  • Patientons quelques minutes, si ça ne t’embête pas. Ça ne devrait pas tarder.
  • Tu es bien mystérieux, répond Elianor avec un sourire.

Au bout de quelques minutes, Nat aperçoit la silhouette de Myst très haut dans le ciel. Il lui fait un signe pour lui demande d’approcher. Myst le voit, et entame la descente. Nat se tourne vers Elianor et lui dit :

  • N’ai pas peur, mais j’ai mon ami le dragon qui vient me chercher.

Elianor ne sait pas quoi dire. Nat a l’air sérieux, mais elle sait bien que les dragons ne viennent pas ici. D’ailleurs elle s’est toujours demandé si ce n’était pas une légende, elle n’en a jamais vue. Et même si ses livres d’histoire en parlent, elle a toujours eu du mal à les croire.

Elle n’a dans tous les cas pas vraiment le temps d’y réfléchir car, en levant la tête, elle aperçoit le petit dragon rouge se rapprocher rapidement d’eux, et finalement venir se poser sur le donjon à quelques mètres d’elle.

Nat et Myst sont contents de se retrouver. Nat voit bien que Myst a grandi depuis la veille. Il est magnifique. Elianor, elle, est ébahie par la scène. Nat se tourne vers elle.

  • Alors tu me crois maintenant ?

Elianor met un peu de temps à répondre. Nat, lui lance un grand sourire en attendant sa réponse.

  • Mais c’est impossible. Alors tu viens vraiment d’un autre monde ? Tu arrives à parler avec lui ? Comment vous êtes-vous rencontrés ? Il faut que tu me racontes tout ça !
  • Je n’ai pas beaucoup de temps, nous devons repartir avec Myst. Nous devons traverser la mer Turquoise et rejoindre la forêt des mirages. Mais oui, je viens d’un autre monde. Je ne peux pas t’en dire plus maintenant, mais j’espère qu’on se reverra bientôt et qu’on ait le temps de reparler de tout ça.

Nat saute alors sur le dos de Myst, qui s’apprête à s’envoler. Elianor lui lance :

  • Ne pars pas comme ça, tu dois m’expliquer tout ça ! Mon père sera aussi très intéressé par ton histoire.

Mais Nat ne peut pas perdre plus de temps. Il comprend que s’il restait, il risquerait d’être coincé longtemps ici et que Myst serait sûrement étudié en détail. Et c’est peu probable que ça lui plaise.

Il dit donc à Myst d’y aller et il crie à Elianor :

  • Je reviendrai te voir, je le promets !

Elianor voit bien qu’elle n’arrivera pas à le retenir. Et finit par lui souhaiter bon voyage et lui crier à bientôt.

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